Au-delà de la découverte de son travail, nous avons eu la chance de nous entretenir longuement avec Henri-Clairy Hembert. L’artiste au parcours exceptionnel a accepté de se livrer à une interview, nous permettant d'en apprendre davantage sur lui. Avec une générosité et une franchise remarquables, il nous a confié ses souvenirs, ses inspirations et ses espoirs pour l'avenir.
1. Pouvez-vous nous raconter l’un de vos premiers souvenirs à vos débuts ?
À l’école on faisait des rédactions avec des illustrations. Je m’occupais de faire celles de mes camarades. Je m’adaptais aux rédactions des autres pour créer des illustrations.
2. Y’a-t-il des artistes ou des styles qui vous inspirent particulièrement dans votre travail ?
J’adore Monet et aussi Dali, j’ai toute une collection de livres regroupant les œuvres de ces artistes. Je m’en suis servi pour trouver mon style, mon trait de crayon et savoir ce que j’aimais, ce qui me procurait du plaisir. Je dis toujours si on ne prend pas de plaisir à peindre, il faut arrêter de peindre, ça ne sert à rien.
3. Avez-vous des outils ou des matériaux spécifiques que vous préférez pour vos œuvres ?
4. Qu’est-ce que l’art vous apporte dans votre vie quotidienne ?
L’art m’apporte une bouffée d’air frais et de plaisir !
5. Quels sont vos moments préférés pour peindre ?
J’aime peindre le matin très tôt ou alors vers 16-17 h dans le calme. Quand j’étais jeune, je peignais la nuit pour travailler calmement parce qu’on était une grande famille. On était 9 à la maison, je suis le 8e d’une grande fratrie.
6. En dehors de la peinture, y a-t-il d’autres formes d’art ou loisirs que vous aimez pratiquer ?
Le bricolage et le jardinage. J’adore les fleurs et les arbres. D’ailleurs, dans mon jardin j’ai planté des châtaigniers, des hêtres et des saules pleureurs tortueux. En tout, j’ai planté 250 arbres et j’espère, dans une quinzaine d’année, avoir « mon petit bosquet dans le jardin ». Je pense aussi à ma descendance, les arbres aspirent du carbone et créent de l’oxygène, c’est mon petit geste pour eux. J’adore décorer aussi, c’est une autre façon de créer. Actuellement, j’aménage mon garage pour faire un deuxième atelier que je pourrai utiliser quand d’autres artistes viennent. Comme ça je garde mon espace, mon atelier, et eux ont leur espace.
7. Est-ce que votre atelier est ouvert au public ?
Non. J’ai déjà essayé à Berck et j’étais obligé de m’enfermer pour pouvoir être au calme. J’étais toujours dérangé par les clients pendant que je peignais.
8. Vous avez des enfants, qu'on voit d'ailleurs sur certaines photos que vous partagez sur Facebook et dans votre dernier reportage, ont-ils déjà commencé à explorer l’univers de leur papa ?
Deux de mes enfants sont facilement à l’aise avec la création, ça me fait rire parce que je me revoie enfant. Mon fils de 11 ans a déjà un bon trait de crayon, ça vient naturellement chez lui. La deuxième Selma, ma petite fille, elle peint et demande toujours à voir les œuvres de son papa. On passe beaucoup de temps ensemble dans mon atelier.
9. Parlez-nous un peu de votre maison, vous avez une histoire bien particulière avec elle n’est-ce pas ?
La maison que j’occupe, ça fait 33 ans que je l’ai vue. J’ai tout de suite été séduit par le grand jardin, mais à l'époque je n’avais pas assez d’argent pour l’acheter. Ma mère m’a dit « un jour, cette maison tu l’auras ». Aujourd’hui, au bout de 33 ans j’ai réussi à l’acheter. C’est un plaisir d’arriver à atteindre ses rêves.
10. Quels est, selon vous, le plus gros défaut d’un artiste ?
Je dis toujours « l’Artiste à un grand défaut » c’est l’observation. On est toujours en train de tout détailler, toujours en train de penser, de réfléchir à ce qui pourrait être fait.
11. Comment savez-vous que vous avez finalisé une œuvre ?
Tant que l’œuvre n’est pas signée, elle n’est pas finie. La signature sur une œuvre, c’est comme le mot fin dans un livre. Quand on crée une toile, je dis toujours « si tu n’es pas content de ton travail, il ne faut pas le signer » sinon tu te mens à toi-même et ça ce n’est pas bon.
12. Est-ce difficile de concilier sa vie de famille et sa vie d’artiste ?
Quand on crée une famille, on est moins libre qu’avant. Quand on a une femme, ça change la vie…positivement [Rires] mais on a des horaires, on a des obligations différentes. La concentration sur l’art n’est plus la même.
13. Quels sont vos projets artistiques pour à venir ?
J’ai des projets mais je préfère ne pas en parler pour l’instant.
14. Avez-vous des expositions prévues ?
Non, je n’ai pas d’expositions prévues prochainement. En ce moment, je prends du plaisir à créer dans mon atelier. Des gens viennent me voir alors ça remplace un peu les expositions.
15. Y a-t-il une technique, un style ou un support que vous aimeriez explorer dans le futur ?
L’année prochaine, j’aimerais essayer de travailler du verre avec un chalumeau, pour voir un peu les résultats que je pourrais obtenir… mais ça doit chauffer [Rires]. J’ai beaucoup d’idées originales comme mouler du verre plutôt que de le souffler. J’aimerais créer une table parce qu’on s’en sert souvent.
16. Si vous pouviez prodiguer un conseil à une personne souhaitant se lancer et s’inspirer de votre parcours, quels conseils lui donneriez-vous ?
Le mot art ou artiste me dérange un petit peu. Pour moi ça ne veut rien dire. Si on réfléchit bien, si on prend 15 personnes, ils sont tous artistes à leur manière.
J’ai croisé des gens qui m’ont fait rire, ils ne font pas de toiles réalistes, ils ne tracent que des traits, ce ne sont pas des artistes pour moi. Il faut commencer en bas pour arriver en haut.
17. Pouvez-vous nous parler d’une œuvre en particulier qui vous tient à cœur ? Qu’est-ce qu’elle représente pour vous ?
La grande œuvre que j’ai créée pour représenter mon handicap. Je l’apprécie beaucoup.
18. Comment le public réagit-il habituellement à vos œuvres ?
En général on me dit « tu n’as même pas besoin de signer on reconnaît la patte », ça me fait plaisir. Si c’est un artiste qui me dit ça, je lui propose de venir créer quelques toiles ensemble, de partager un moment de plaisir, de créativité, d’échange. C’est toujours intéressant.
19. Avez-vous une petite anecdote à nous partager sur vos expositions ?
Quand j’étais jeune, je m’arrangeai pour exposer des œuvres sans être reconnu. Une personne gardait les toiles et moi je trainais dans l’exposition pour voir les réactions des gens. J’adorais ça. On apprend beaucoup comme ça parce que les gens ne regardent pas la toile en tenant compte du handicap, on est égaux aux autres artistes.
20. Pourquoi réaliser de si grandes toiles ?
Juste une envie et plus de plaisir. Vous n'allez pas me croire mais j’ai recommencé la toile 3 ou 4 fois entièrement parce qu’elle ne me plaisait pas. Au départ le fond était jaune, maintenant il est bleu. J’ai ajouté de la matière, du volume, retravailler les raccords pour arriver au résultat final. Au fur et à mesure de la toile, je suis rentré au plus profond de moi pour réussir. J’ai passé presque 3 semaines autour de la toile avant de commencer à prendre réellement du plaisir pour la finir.
Conclusion
Rencontrer Henri-Clairy Hembert a été une véritable source d'inspiration pour chacun d'entre nous. À travers ses œuvres et son témoignage il démontre que l'art dépasse toutes les frontières, qu'elles soient physiques ou créatives. Chacune de ses toiles témoigne de sa résilience et de sa passion, offrant une vision unique et pleine de sensibilité. Son parcours nous rappelle que l'art, bien plus qu'une forme d'expression, est une manière de toucher les autres, de se réinventer et de surmonter les obstacles. Henri-Clairy incarne l'idée que l'art n'a pas de limites, et que chaque geste créatif est une victoire sur les défis de la vie.
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